Cela fait bien longtemps que je veux t’écrire cette lettre. Voilà plus de vingt ans que j’ai, au fond d’un tiroir, ton histoire. Une histoire dont tu m’as faite dépositaire. Alors que je savais qu’elle avait beaucoup d’importance pour toi, je ne me suis pas immédiatement rendue compte du cadeau que tu me faisais. Sur le moment, je m’en suis emparée pour la mettre en forme comme il se devait, respectant mot pour mot ta parole. Et pour la partager, comme tu me l’avais demandé, avec tous les membres de la famille.

Depuis quelques années, un sentiment d’inachevé m’habite. J’ai l’intime conviction qu’il faut que j’en fasse quelque chose. Je prends enfin conscience que si tu me l’as remise à moi, personnellement, ce n’est sans doute pas un hasard.

Ce n’est pas tant l’histoire qui m’importe aujourd’hui, même si elle ne peut que contribuer à faire perdurer une mémoire qui, les générations passant, s’effacera bientôt.

Cette histoire nous relie. Cette histoire fait lien.

Quel lien ? Quel rôle joue-t-elle ? Je n’en sais rien. Elle est là, bien présente. Passeuse de mémoire.